Lorsqu’un patient souffre d’une arthrose diffuse de son genou qui n’est plus soulagée par les traitements médicaux, il se voit proposer la pose d’une prothèse totale de genou qui remplace la totalité du cartilage articulaire.
Si ce type de prothèse donne de très bons résultats fonctionnels, il reste assez exceptionnel pour un patient porteur d’une prothèse totale de genou d’oublier totalement sa prothèse. A titre de comparaison, les prothèses totales de hanche sont « oubliées » au bout d’un an dans environ 85% des cas.
On a donc assisté au cours de l’histoire de la chirurgie prothétique du genou à différentes évolutions pour tenter d’améliorer la qualité du résultat et le ressenti des prothèses.
Depuis 2019 est disponible un nouveau type de prothèse totale de genou dite « sur-mesure ». Pour comprendre cette évolution il faut effectuer un bref rappel de ce que sont les prothèses de genou « classiques ».
Nos genoux n’ont pas tous la même taille et l’usure qui conduit à la pose d’une prothèse n’entraîne pas le même degré de déformation selon les patients. La pose d’une prothèse de genou va donc consister à implanter une prothèse d’une taille correspondant à celle du genou « du patient » et les coupes osseuses fémorales et tibiales qui permettront cette implantation devront également réaxer correctement le genou.
Dans le cas des prothèses de genou « classiques », une instrumentation spécifique va permettre de mesurer au cours de l’intervention la taille du genou natif afin de choisir une prothèse de la taille correspondante, le chirurgien disposant en salle d’opération d’une grande variété de tailles d’implants. Des mesures radiologiques préopératoires vont permettre de déterminer les angles avec lesquels seront effectuées les coupes osseuses pour réaxer le genou. Ces coupes seront réalisées à l’aide d’une instrumentation réglable qui est commune pour tous les patients.
Par la suite, certaines évolutions ont cherché à améliorer la précision des angles de coupes pour tenter d’obtenir une réaxation optimale du genou.
On a vu ainsi apparaître au début des années 2000 la navigation chirurgicale. Un ordinateur et des capteurs optiques présents en salle d’opération permettent de faire un repérage dans l’espace de la morphologie, des axes et du plan de rotation du genou afin de déterminer comment doivent être positionnés les guides de coupes osseuses de l’instrumentation pour que la ré-axation du genou soit la meilleure possible.
Une seconde évolution est apparue il y a une dizaine d’années avec l’apparition de guides de coupes personnalisés. Au lieu d’utiliser une instrumentation réglable classique pour effectuer les coupes osseuses, des guides de coupes en plastique spécifiques pour chaque patient sont fabriqués en impression 3D en amont de l’opération à partir d’un scanner du genou du patient.
L’objectif de ces évolutions était d’améliorer la précision des angles de coupes mais différentes études ont montré qu’il n’y avait pas de différence significative avec des coupes effectuées à l’aide d’une instrumentation classique. Dans la mesure où ces évolutions complexifient la préparation ou la réalisation de l’opération sans apporter d’amélioration évidente, elles ne se sont jamais réellement imposées.
Que ce soit pour la navigation chirurgicale ou pour les guides de coupes personnalisés, la prothèse de genou elle-même ne change pas. Son dessin, ses rayons de courbures sont les mêmes pour tous les patients. On pourrait comparer cela à du « prêt-à-porter » : une prothèse de même forme pour tous mais des tailles différentes disponibles. Certains ont émis l’hypothèse que si certains patients avaient des résultats décevants et « sentaient » toujours leur prothèse c’est parce que le dessin de celle-ci était différent de celui de leur genou d’origine.
On voit donc apparaître depuis 2019 des prothèses de genou « sur-mesure ». A partir d’un scanner du genou du patient, une prothèse est taillée à la forme du genou d’origine du patient et des guides de coupes personnalisés permettant son implantation sont fabriqués en impression 3D.
Il est encore beaucoup trop tôt pour dire si cette évolution permettra d’améliorer la qualité des résultats obtenus. Il est préférable de réserver, pour le moment, ce type de prothèse à des arthroses responsables de déformations modérées et sans pathologie ligamentaire associée car la planification ne tient pas compte d’une hyperlaxité ligamentaire susceptible de poser des problèmes spécifiques plus facilement gérables avec une prothèse « classique ».
A titre personnel, j’utilise dans certaines indications ces prothèses d’autant plus que le process industriel qui va de la réalisation du scanner à la fabrication de la prothèse et des guides de coupes personnalisés et à sa livraison au bloc opératoire est parfaitement fiable. La technique de pose l’est également. Ces prothèses « sur-mesure » me paraissent représenter une évolution intéressante dans la chirurgie prothétique du genou susceptible d’améliorer le résultat fonctionnel mais il n’y a pas encore suffisamment de recul pour le confirmer. Cela ne résoudra néanmoins pas tous les problèmes car la capacité qu’ont les matériaux constitutifs des prothèses d’amortir les impacts est différente de celle du genou natif et il est malheureusement peu probable que ces prothèses soient totalement oubliées.
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Prothèse totale de genou
La pose d’une prothèse totale de genou est proposée en cas d’usure diffuse du cartilage du genou lorsque les traitements médicaux ne parviennent plus à soulager les douleurs et que la capacité du patient à se déplacer est altérée. Les objectifs de de cette opération sont une suppression des douleurs et une restitution fonctionnelle du genou permettant de marcher sans limitation et autorisant les activités sportives douces (randonnée, golf, vélo, natation, gymnastique).